Dans les années 1980, Oliver Stone, ancien élève de Scorsese oscarisé pour Platoon, entreprend, pour sa première collaboration avec les studios hollywoodiens, de mettre en scène l’effervescence de la Bourse américaine, dopée par la dérégulation reaganienne et l’ahurissante accélération des profits. Une fresque au cœur de la jungle de la haute finance qu’il documente avec son scénariste Stanley Weiser. Dans le film, Bud Fox, jeune courtier, tente de surfer sur la déferlante de dollars, dans l’ombre du trader Gordon Gekko, prédateur survolté, inspiré par les golden boys, nouveaux maîtres du monde dont certains seront condamnés pour délits d’initiés.
Ironie de l’histoire
Au travers d’entretiens inédits avec les protagonistes – dont Oliver Stone et Michael Douglas –, le documentariste Rémi Lainé (La rançon) revisite l’histoire de ce film visionnaire sorti à la veille du krach d’octobre 1987. Il montre d’abord combien le cinéaste met au jour avec lucidité les mécanismes du capitalisme financier dont les années 1980 marquent l’avènement, avant les crises à répétition comme celle des subprimes. Mais si Wall Street triomphe au box-office, il échoue dans sa critique radicale du système, hissant – ironie de l’histoire – le requin Gekko au rang d’icône de l’argent roi. Donald Trump reprendra d’ailleurs sa tirade culte "greed is right" ("la cupidité, c’est bien"). Le documentaire, enfin, lève le voile sur la filiation qui infuse le film : l'hommage d'Oliver Stone à son père, courtier gentleman d’un âge révolu ; Michael Douglas, comparé défavorablement au grand Kirk sur le tournage pour stimuler sa rage de vaincre (laquelle lui vaudra un Oscar) ; ou le puissant duo père-fils formé par Martin et Charlie Sheen, respectivement mécanicien syndicaliste et apprenti trader à l’écran. Un éclairage passionnant.
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- Langue
- fra
- Date de publication
- 15/11/2017